
Grégoire Andrieux est managing partner du bureau parisien de McDermott Will & Emery, une fonction qu’il occupe depuis 2019. Derrière ce titre se cache un professionnel au parcours riche, qui a su allier rigueur académique, expérience internationale et sens des affaires pour se hisser au sommet d’une profession exigeante. Son regard sur le métier d’avocat d’affaires est celui d’un passionné, mais aussi d’un pragmatique, conscient des défis et des responsabilités qu’implique ce rôle.
Dès son plus jeune âge, il nourrit le désir de devenir avocat, même si, à l’époque, il ignore encore ce que cela signifie réellement. Il entame ses études de droit avec la conviction que cette voie lui conviendra. Ce n’est qu’au fil de ses expériences universitaires qu’il affine son intérêt pour le droit international et comparé. Un premier tournant survient lorsqu’il part au Canada, à l’Université d’Ottawa, pour une année d’échange qui le marque profondément. L’exposition simultanée aux systèmes de Common Law et de droit civil éveille en lui une curiosité intellectuelle et un goût pour l’analyse comparative qui ne le quitteront plus.
Fort de cette découverte, il poursuit ses études avec un DEA en droit comparé, avant d’intégrer un LLM à l’Université du Texas à Austin. Il reconnaît aujourd’hui combien cette formation a été structurante, lui offrant un prisme d’analyse élargi et une capacité d’adaptation précieuse dans un univers juridique en perpétuelle évolution. Le DEA en droit anglais et nord-américain des affaires lui a particulièrement permis de développer une approche fine des systèmes anglo-saxons, un atout majeur lorsqu’il s’est agi d’intégrer des cabinets internationaux. Cette double formation lui a inculqué une souplesse de pensée et une capacité à naviguer entre différentes conceptions du droit, indispensables dans la pratique du droit des affaires.
Son entrée dans le monde professionnel se fait presque par hasard. Lorsqu’il décroche son premier stage chez Linklaters, puis chez Latham, il ne se doute pas encore qu’il évoluera dans le secteur du private equity. C’est en intégrant Weil Gotshal que tout s’accélère. « Je ne savais pas précisément ce qu’était un LBO quand j’ai commencé », reconnaît-il. Pourtant, il se prend rapidement au jeu et se passionne pour cette discipline à la croisée du droit des contrats, du droit fiscal et de la finance. La dimension stratégique des opérations, l’exigence intellectuelle et la dynamique de négociation finissent par le séduire. « Ce qui me plaît, c’est l’interaction entre les différents domaines du droit et l’approche pragmatique qu’exige ce métier. »
Loin d’être une simple mécanique juridique, le droit des affaires requiert une implication totale. Il insiste sur l’intensité du métier : la pression des clients, la complexité des dossiers, les enjeux financiers colossaux. Les clients sont souvent eux-mêmes des experts et attendent des réponses rapides, adaptées, et stratégiques. Ce niveau d’exigence, loin de le rebuter, constitue pour lui un moteur : « On est challengé en permanence, et c’est ce qui rend le métier aussi stimulant. »
Un aspect essentiel de son approche est la capacité à s’adapter et à innover. Selon lui, un bon avocat d’affaires ne doit jamais partir avec des certitudes, mais au contraire être capable d’évoluer et de repenser ses solutions en fonction des enjeux du dossier. « La négociation est un processus vivant, et c’est en remettant constamment en question les hypothèses que l’on parvient aux meilleures solutions. »
Il insiste également sur l’importance du collectif dans cette profession. Loin du cliché de l’avocat solitaire plaidant seul face au juge, il rappelle que le droit des affaires est un travail d’équipe. Chez McDermott Will & Emery, il évolue avec 90 collaborateurs et associés, tous impliqués dans des dossiers transversaux nécessitant des compétences multiples. Il souligne combien cette dynamique de groupe est essentielle à la réussite d’un cabinet et à la formation des plus jeunes.
Son rôle de managing partner ne l’a pas éloigné du terrain. Il continue à traiter des dossiers, tout en assumant des responsabilités stratégiques au sein du cabinet. Sa mission consiste notamment à assurer la liaison entre le bureau parisien et la maison mère américaine, à veiller à la cohésion des équipes et à piloter la croissance du cabinet en France. Il prend également une part active au recrutement et à la formation des jeunes talents, persuadé que l’avenir du métier repose sur la transmission et le renouvellement des compétences.
Pour les jeunes avocats, il insiste sur un point clé : le développement d’une clientèle personnelle. Selon lui, il est essentiel d’apprendre très tôt à nouer des relations solides avec les clients, car c’est la clé d’une carrière pérenne. « Être un bon technicien ne suffit pas. Il faut aussi savoir écouter, comprendre les besoins et instaurer une relation de confiance. » Il encourage ses collaborateurs à se constituer leur propre réseau et à ne pas attendre que les opportunités viennent à eux.
L’expérience internationale est un autre élément qu’il juge indispensable. Il ne cesse de répéter combien ses séjours au Canada et aux États-Unis ont façonné sa manière de travailler et de penser le droit. « L’internationalisation du droit des affaires impose une ouverture d’esprit. Partir à l’étranger, c’est se confronter à d’autres logiques, d’autres méthodes, et cela nous rend plus performants. » Il rappelle que chez McDermott Will & Emery, 70 % des échanges se font en anglais, et qu’il est devenu impensable d’exercer ce métier sans une maîtrise fluide de cette langue.
Quant aux échecs, il les considère comme inhérents à la profession. « On fait tous des erreurs, on perd des clients, on se trompe parfois sur une stratégie. L’important, c’est de savoir rebondir et d’apprendre. » La pression est permanente, surtout lorsque les enjeux financiers sont considérables, mais il voit dans cette exigence une source de progression continue.
S’il devait résumer sa philosophie, il mettrait en avant trois principes : rigueur, créativité et relationnel. Être avocat d’affaires, c’est conjuguer expertise juridique et sens des affaires, tout en sachant tisser des liens de confiance avec ses interlocuteurs. Aujourd’hui, ce qui le motive le plus, c’est de voir les jeunes générations prendre leur envol, et de contribuer à leur formation. « Construire un cabinet, ce n’est pas seulement accumuler des dossiers. C’est aussi faire grandir des talents, transmettre une manière de travailler, et insuffler une dynamique. »
À travers son parcours et sa vision, Grégoire Andrieux incarne un modèle d’avocat moderne, ancré dans les réalités du marché et tourné vers l’avenir. Une profession exigeante, mais qui, à ses yeux, reste l’une des plus stimulantes et enrichissantes qui soient.
Rédigé par Maud Poirel & Luis Leclerc.
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